Ainsi, François Hollande souhaite "l’apprentissage des sciences du numérique et également la diffusion du codage dès l’école primaire"
L’utilisation de la formule "diffusion du codage" en dit long sur les connaissances informatiques du Président et de ses conseillers, mais après avoir parcouru divers articles et les propositions de loi, c’est bien le terme de codage qui semble être couramment utilisé comme traduction bête et méchante de "coding" alors que le terme de programmation comme il était utilisé à notre époque serait plus approprié. D’ailleurs, où est la révolution dans tout ça ? Moi aussi, j’ai appris le codage il y a 30 ans à l’école avec les Thomson MO5 et Amstrad CPC (voir mon parcours avec l’informatique). Je ne sais pas si les politiques en ont fait tout un foin mais les ordinateurs sont entrés dans les écoles aussi vite que dans les foyers à l’époque. Et nous n’avions pas d’autre choix que d’écrire des programmes pour qu’il se passe quelque chose. Je ne peux pas dire quand et pourquoi cet apprentissage a disparu mais c’est bien ça le problème.
Bon c’est sûr, les enseignants de l’époque étaient encore moins formés que maintenant et découvraient en même temps que nous ; notre instit de CM2 nous avait distribué des photocopies de clavier pour qu’on s’entraîne à trouver les lettres afin de ne pas mettre trois heures pour taper nos premiers programmes de 5 lignes. Au collège, on nous apprenait les rudiments du langage mais pas la logique et cela consistait surtout à recopier des programmes qui faisaient des formes géométriques. Moi, ça m’avait intéressé et j’étais allé au club informatique le midi et on faisait des trucs un peu plus rigolos. Je me souviens d’un petit programme qui attendait qu’on appuie sur une touche pour afficher des tas de pixels de couleur, style télé HS ; j’avais recopié le programme de tête sur un ordi en démonstration à Auchan et je guettais les badauds qui se faisaient prendre et s’en allaient mine de rien, pensant avoir détraqué l’ordi (le Ctrl/C était déjà de rigueur pour arrêter les programmes).
Trêve de souvenirs. Maintenant, qu’est-ce qu’il faut faire ?
Certains trouvent que c’est une fausse bonne idée et d’autres l’imposeraient dès la fin des biberons.
Pour moi, comme je l’ai écrit dans mon billet précédent, je trouve que l’initiation à la programmation est inutile avant dix ans et tant qu’on ne sait pas lire et écrire, car ce sont les priorités de l’école primaire. Ne doutons pas que les enfants auront eu accès bien avant à des ordinateurs pour faire des jeux (éducatifs si possible) et taper des textes qu’ils auront produit ainsi qu’aux divers objets tactiles de leurs parents. Mais cela ne consiste pas en un apprentissage, juste un outil (tout comme j’avais pu utiliser une machine à écrire au boulot de mon père et jouer à des jeux électroniques). Ce dont on parle, c’est véritablement de comment cela fonctionne ? Et donc de la "diffusion du codage".
Pour moi, et parce que j’ai vraiment découvert la chose comme cela, cet apprentissage est une logique qui n’a pas besoin d’ordinateur pour s’apprendre ; cela s’appelle l’algorithmique et de manière plus vaste le modèle. Car pour écrire du code, il faut avoir une logique, savoir mettre à plat un processus en divers modules et manier tout ça dans des boucles et des conditions. Tout ça peut être fait simplement sur papier et certains auront cette logique, d’autres moins. Certains seront passionnés, d’autres pas du tout. Mais c’est l’essentiel de ce qu’il y a comprendre et cela ne doit pas être une matière décisive car elle ne sert pas dans la vie courante, par contre cela permettrait de diriger ceux qui aiment vers les options et les filières qui permettent d’approfondir ce domaine. Tout comme les autres matières manuelles et artistiques.
Une petite parenthèse libriste mais parce que cela semble évident et c’est souvent répété par Richard Stallman, pour devenir développeur, il faut lire du code et pour cela, il faut qu’il soit ouvert. Parce que dans les petits programmes de mon enfance puis lors de mes emplois en tant que développeur, j’ai pu modifier des variables ajouter des choses : c’est toujours comme cela que l’on commence ; en corrigeant des bugs et en ajoutant des fonctionnalités ou en s’inspirant d’autres programmes pour en créer de nouveaux. Et pour que les enfants aient accès à du code, puisse le lire et le modifier si cela les intéresse, il faut qu’ils utilisent des logiciels libres dès le départ, pas à des iPad ou autres windows propriétaires.
Pour moi, un véritable enseignement de l’informatique (du numérique comme ils disent vaguement, quand ils n’utilisent pas digital alors que leurs doigts n’ont rien à voir avec cela), plutôt que de se baser sur une tablette pour tous qui ne leur apprendra rien de son fonctionnement, consisterait en un raspberry pour tous. A partir de cette carte simple et pas chère, on ouvre les portes sur tout le fonctionnement des systèmes, aussi bien matériel que logiciel et réseau, tout en ouvrant sur tous les projets possibles. Malheureusement, ces objets intéressent plus les gens comme nous qui avons appris à bricoler des machines car elles ne pouvaient pas fonctionner autrement. C’est sûr que pour les enfants qui ont toujours vu des écrans faire des tas de choses sans avoir autre chose à faire que d’appuyer sur un bouton et tapoter l’écran, écrire un programme "Hello world" n’a rien de trippant mais c’est pourtant bien le goût de cela qu’il s’agit d’inculquer aux nouvelles générations si on ne veut pas qu’elles considèrent le numérique comme de la magie (il suffit d’écouter les les gens qui nous entourent lorsque quelque chose ne fonctonne pas comme ils le souhaitent).
1 De genma -
De bonnes réflexions sur l'apprentissage de l'informatique, j'aime bien les idées et l'argumentation .
2 De Angristan -
Le Raspberry Pi était fait pour cela à la base... Mais ce n'est plus vraiment le cas
3 De alterlibriste -
Merci Genma
@Angristan : oui, c'est ce que je disais dans un billet il y a déjà quelques temps
4 De Trefix -
Bonsoir.
Je rebondis ici, n'ayant pas pu sur un billet plus ancien : scolarité "ratée" niveau informatique (3 séances de DOS sur calculatrice en 3e et j'ai vu une fois les Atari, qui n'ont jamais voulu tourner en réseau) je suis devenu simple utilisateur sans jamais avoir pu "mettre les mains dedans".
Pour les bagnoles, j'ai appris par moi-même, seul avec la RTA (par goût ET par nécessité) depuis la fin des années 80 ; c'était possible alors de mettre les mains dedans petit à petit, sans prendre trop de risque, les interventions simples permettant d'acquérir l'expérience pour se lancer progressivement dans les plus complexes.
Aujourd'hui, lassé du tout-venant numérique, excédé d'être cerné en permanence par des "cookies" qui m'inondent de pub -pour la partie visible de leur travail méthodique- je voudrais rejoindre le monde libre.
MAIS, car il y en a un, et de taille, il en va de l'informatique comme de l'automobile : tout a été fait et méticuleusement calibré pour qu'il ne soit aujourd'hui plus possible de se dém...er seul dans son coin. La volonté ne suffit plus, malgré le support efficace de petites communautés (fora), je suis trop vieux (45) pour m'en sortir sans avoir de temps en temps un soutien en chair et en os, avec moi derrière ma bécane, quand j’atteins les limites de ma compréhension, n'ayant jamais appris le langage.
Bref, l'accès libre au cœur de la "mécanique" est une condition sine qua non mais actuellement la complexité de l'outil est telle qu'il me semble impossible -quel que soit l'âge- de s'en sortir sans un solide soutien. L'école a un rôle à jouer, c'est certain, mais ne pourra guère que proposer une initiation extrêmement rudimentaire.
Et je crains fort que même avec la meilleure volonté il ne soit pas possible de dépasser ce stade -et de s'affranchir de la tutelle des Win/Mac/Google- si ceux qui ont mis les mains dedans il y a longtemps ne font pas un effort énorme de patience pour guider les nouveaux.
De mon côté, je mets tout en œuvre pour faire profiter les amateurs de ce que j'ai acquis comme maîtrise de l'oélopneumatique du père Magès. Mais je cherche encore mon "double" dans le monde numérique libre...
Sans amertume aucune, et je vous souhaite une bonne soirée.
5 De alterlibriste -
Merci Trefix pour ton commentaire, il y a beaucoup de choses dedans, cela pourrait presque faire l'objet d'un billet complet pour tout aborder mais c'est intéressant car c'est rare que des "non-pratiquants" passent par ici.
Peut-être voulais-tu réagir à mon billet expliquant comment j'ai hacké ma chaudière et où je généralise le concept de curiosité et d'apprentissage pour la mécanique aux ordinateurs ? (les commentaires sont automatiquement fermés après 40j)
Je ne peux que réitérer ce point de vue, tu as appris la mécanique parce que tu étais curieux et que cela t'intéressais. Tu peux faire de même avec l'informatique. Au contraire de l'automobile, les logiciels libres restent ouverts, certes, celui qui n'y connais rien ne pourra pas comprendre d'un coup et personnellement, je mets rarement le nez dans le code. Mais en suivant des tutoriels tout est possible et il est toujours possible de trouver de l'aide à partir du moment où le problème est clairement posé (un comment on fait pour avoir des logiciels libres n'est pas un problème clairement posé alors que comment ne plus être embêté par les cookies et les pubs, c'est faisable).
Attention de ne pas tout mélanger. Windows et Mac sont des systèmes effectivement fermés alors que sous Linux, tout le système peut être monté comme avec des Lego.
Pour quelqu'un qui n'y connais rien, je conseille d'abord d'installer des logiciels libres dans son système afin de remplacer ceux qui sont propriétaires et se faire doucement aux outils qu'il pourra ensuite retrouver dans un système comme Linux : remplacer MS Office par Libre Office, Windows Media par VLC, Internet Explorer par Firefox (ils sont en téléchargement libres sur les pages officielles, seules sources sûres et non polluées). Lorsque tu as Firefox, dans le menu, tu peux gérer les modules complémentaires (icône puzzle) et installer Self Destructing Cookies et Adblock Edge afin de ne plus être embêté par les cookies et les publicités. Pour plus de détails, aller voir sur cette page : http://blog.adminrezo.fr/2013/12/eviter-le-tracking-et-la-publicite-pour-la-navigation-sur-les-sites-web/
6 De Trefix -
Merci. Oui, j'ai adoré le hacking de la chaudière ;)
Et j'aime bien comprendre ce que je lis, aussi, ce qui explique sans doute que je lise ici régulièrement... et sois encore à la recherche d'un support réellement adapté mes "compétences" informatiques.
7 De Thierry -
On doit etre du même age , j'ai commencé en 6eme dans un club info sur TO7 / Mo5 , surtout ceux avec les touches plates qui t'affichaient 15i au premier touché un peu long :-D
8 De Elessar -
Intéressant, tu fais le même constat que moi, à savoir qu'il y a eu, à une époque, un vrai enseignement de l'informatique dans les écoles, mais que celui-ci a été abandonné par la suite, pour être remplacé par quelques séances qui servent à apprendre aux enfants à mal se servir de Microsoft Word, ce qui n'a absolument aucun intérêt.
9 De Jerome BAPTISTE -
@Trefix. Tu dis que tu est trop vieux, tatatata. Mon oncle c'est mis à l'informatique après 45 ans. Mon oncle se débrouillait très bien, a l'époque il programmait autant que moi. Il me filait des astuces de programmations. A l'origine, il était plâtrier, puis chef d'équipe à la DDE.
Tout ça pour dire il n'y a pas d'ages pour commencer l'informatique et pas de niveaux minimums. Tout (ou presque) est une question d'intérêts.
Apprendre le "codage" au plus jeune âge, pourquoi pas ... Je pense que si l'enfant est intéressé, il accrochera. Il est donc important de bien lui présenter les choses. On m'a fait chier un bon moment avec l'histoire, la philo, dont je ne voyais pas l'intérêt à l'époque. Maintenant, je vois l'intérêt. Si on ne me les avait pas présenté ? Probablement je vivrais très bien sans philo,l'histoire permet d'anticiper certaine chose dans le futur. Je suis donc heureux que l'on me les a présenté.
Oui au codage à l'école. La présentation du codage est sûrement une bonne chose. Avant le CM1, je doute que ça intéresse vraiment. Il faudra aussi avoir des professeurs qui soient intéressés. De mon point de vue, lorsqu'on ne maîtrise pas son sujet, la transmission se fait mal, et l'intérêt suscité est assez bas.