Parmi les libristes et tous les geeks en général, les discussions vont souvent bon train pour savoir quelle version de tel ou tel logiciel ils ont et "mais comment c’est possible ? tu n’as pas installé la 3.16.14, elle est trop bien !"
Cette fuite en avant fait parfois sourire, et on peut parfois se demander son utilité.
Sous GNU/Linux, cela fait des débats passionnés et fait partie des critères de choix pour les distributions avec à ma droite les pro-stabilité qui ne jurent que par Debian Stable et à ma gauche les inconditionnels des dernières versions toutes chaudes sorties du moule qui ne voient pas le monde autrement que sous Arch Linux.
Loin de moi l’idée de créer un ultime débat inutile, les logiciels libres permettent cette diversité et chacun y pioche ce dont il a besoin, mais je voudrais juste briser quelques préjugés pour défendre ma distribution préférée, à savoir Debian.
Dans un premier temps, je voudrais d’abord préciser que les non-barbus n’en ont généralement rien à faire d’avoir la dernière version et préfèrent même souvent ne pas changer leurs habitudes. Ainsi, ils gèrent très bien leur quotidien sous XP, Seven au mieux, et toutes les antiquités installées à l’origine. En quoi cela est-il gênant ? Certes, il vaut mieux quand même faire les mises à jour de sécurité et avoir un navigateur qui sait gérer les derniers standards du web mais pour l’utilisation courante, être sous un VLC 1.x n’empêche pas de visionner une vidéo et Libre Office 3.5 (quand ce n’est pas Open Office 2.2) permet toujours d’écrire son courrier.
Sans vouloir troller l’ami Fred qui n’est pas loin de considérer qu’à partir du moment où un logiciel est stable, il est déjà obsolète et ne tourne quasiment que sur des versions Beta (et c’est son droit car il veut avoir toutes les dernières fonctionnalités et permet ainsi de tester et remonter les bugs), la grande majorité des utilisateurs n’ont pas besoin de plus qu’une version stable, parce qu’il vaut mieux qu’ils n’aient pas de bugs.
J’avoue que personnellement, je joue à ce jeu là sur mon téléphone car Firefox OS est si jeune que les versions de développement apportent des fonctionnalités importantes qui font oublier les éventuels bugs.
Pour autant, sur mon PC, j’ai du mal à devoir tout reparamétrer tous les 6 mois et lorsque j’étais sous Ubuntu, je ne sautait le pas que tous les un ou deux ans et pestais sur les applis qui disparaissaient ou étaient remplacées par d’autres. Finalement, je ne suis qu’un utilisateurs comme les autres bien attaché à ses habitudes, même si à force de test, elles peuvent évoluer.
Ne pas changer de version tous les six mois permet aussi d’avoir un environnement de travail stable, bien fignolé pour tous les besoins sans risque de régression ou de disparition de certaines fonctionnalités. C’est la raison pour laquelle je préfère avoir mon environnement de travail sous Debian Stable ; ce qui ne m’empêche pas d’avoir une Testing pour voir comment ça évolue et tester si tous mes besoins sont satisfaits, mais dès que je suis plus de deux semaines sans y faire un tour, j’ai droit à des tas de mises à jour et l’environnement de bureau ne cesse d’évoluer ; pour les plus adeptes de la rolling-release tant vénérée par les plus barbus, il y a aussi moyen de tourner sur Sid et là, on est presque toujours au top mais il ne faut pas avoir peur des mises à jour incessantes.
Alors effectivement, rester deux ans sur une distribution sans évoluer ne permet pas d’avoir des mises à jour majeures mais c’est bien pour cela qu’il y a les backports et si je revendique le droit d’être sur mon Gnome 3.4 réglé au petits oignons, je veux bien effectivement avoir un Libre Office à jour et surtout la dernière version de Firefox sans son logo (i.e. Iceweasel). Et cela se règle par deux lignes dans le /etc/apt/sources.list :
deb http://ftp.debian.org/debian wheezy-backports main
deb http://mozilla.debian.net/ wheezy-backports iceweasel-release
et la commande
apt-get install -t wheezy-backports votre-logiciel-que-vous-voudriez-pas-trop-à-la-ramasse
Bien sûr cela ne marche pas avec tout et après un certain temps les librairies commencent à faire défaut ou il y des choix à faire parce que tel logiciel a une dépendance plus récente qu’un autre surtout quand on commence à compiler mais là, on est déjà largement entré dans le domaine du barbu plus à l’aise sur des versions de test que des versions stables.
Le tout est de trouver son équilibre selon ses besoins et c’est bien là tout l’intérêt des différentes distributions à notre disposition.
1 De Olivier -
Super article ! C'est le gros avantage de Linux et des logiciels libres c'est le choix de tourner sur des versions beta, et sur des versions stables sans pour autant cloisonner les deux, le cas Libreoffice qui encore compatible avec Openoffice 1.
Cette fuite en avant comme tu dis a été hérité du monde propriétaire où pour vendre toujours plus il faut une nouvelle version toujours plus rapidement et toujours plus spectaculaire que l'ancienne. Couplé avec une certaine presse dite "informatique" qui elle aussi pour vendre plus de papier nous inonde d’ersatz d'articles pour soit disant nous informer de LA dernière fonctionnalité de la mort qui tue, exemple : "la croix pour fermé une fenêtre est maintenant du côte gauche au lieu d'être à droite".
Plus personnellement je suis de ceux qui pensent que d'avoir le choix des versions, logiciels, pour travailler ensemble est plus important que d’utiliser la dernière version seul dans son coin.
2 De Thuban -
Ça fait plaisir de voir un article comme celui-ci. Un peu de raison ne fait pas de mal et rééquilibre certaines idées trop ancrées.
Pour ma part, je n'ai qu'une chose à ajouter : mon pc tourne comme une debian.
3 De Frederic Bezies -
@olivier : la fuite en avant est un argument facile. Mais il faut rester réaliste. Des logiciels connectés aux réseaux se doivent d'être à jour. Ensuite, c'est moins évident pour une trousse bureautique.
Deux exemples récents : http://www.lemondeinformatique.fr/a...
http://www.linternaute.com/hightech...
Sans oublier l'année dernière avec Bash (et sa série de mise à jour) ou encore OpenSSL.
@Thuban : Tu trouves ton bonheur dans une distribution dont les logiciels sont gelés (sauf mise à jour critique). Très bien.
Une rolling sur un serveur, c'est de la folie furieuse. Mais cela peut s'envisager sur un poste de travail.
Chacun doit être libre de choisir. D'ailleurs, j'ai installé une Debian Wheezy 7.8 et étrangement, le navigateur internet proposé était la version Debianisée de Mozilla Firefox 31.4.0 ESR... Quelle hérésie, un logiciel aussi récent :)
4 De Frederic Bezies -
Je pensais avoir posté un commentaire il y a plusieurs heures, mais je n'avais pas validé son envoi, donc, je le recommence.
"Sans vouloir troller l’ami Fred qui n’est pas loin de considérer qu’à partir du moment où un logiciel est stable, il est déjà obsolète et ne tourne quasiment que sur des versions Beta (et c’est son droit car il veut avoir toutes les dernières fonctionnalités et permet ainsi de tester et remonter les bugs), la grande majorité des utilisateurs n’ont pas besoin de plus qu’une version stable, parce qu’il vaut mieux qu’ils n’aient pas de bugs."
Voici la liste des logiciels que j'utilise en version de développement :
1) Mozilla Firefox (en nightly compilée maison)
2) Mozilla Thunderbird (cf la ligne au-dessus)
3) Qemu
4) Easytag
Et le reste doit être des versions stables ou déclaré comme telle par les développeurs en amont.
Pour IceWeasel, inutile de passer par un dépot tiers. Si on fait une recherche rapide sur ftp://ftp.debian.org/debian/pool/ma...
iceweasel-l10n-fr_31.4.0esr-1_all.deb 443 KB 14/01/2015 00:09:00
iceweasel_31.4.0esr-1_amd64.deb 30422 KB 14/01/2015 00:09:00
iceweasel_31.4.0esr-1_i386.deb 31989 KB 14/01/2015 05:14:00
Et si on veut la version non-ESR ?
iceweasel_35.0.1-1_amd64.deb 37353 KB 30/01/2015 05:09:00
iceweasel_35.0.1-1_i386.deb 39067 KB 30/01/2015 12:10:00
iceweasel-l10n-fr_35.0.1-1_all.deb 493 KB 30/01/2015 05:09:00
Donc, sauf erreur de ma part, je pense qu'un simple passage par Synaptic ou par la ligne de commande permet d'accéder à la version soit 31.4.0ESR soit à la version 35.0.1
Pour LibreOffice, dommage de passer par les backports, mais si on travaille dans un environnement hétérogène, c'est mieux d'avoir des versions qui ont un support améliorés des formats non OpenDocument qui sont encore la majorité.
Pour ta conclusion, je suis d'accord.
Mais pour revenir sur un point déjà abordé :
1) Rolling sur un serveur => peloton d'exécution
2) Rolling ou semi-rolling sur un poste utilisateur en dehors des grosses structures : c'est envisageable.
5 De anatolem -
Je suis sous Debian depuis quelques années, elle me convient et j'y trouve ce dont j'ai besoin, actuellement je suis en version testing et j'y trouve mon compte.
A pluche.
6 De Odysseus -
Un article qui fait du bien.
Sans pouvoir expliquer pourquoi, j'aime beaucoup Debian mais l'ai quitté au profit de xubuntu pour avoir une version plus récente d'un logiciel en particulier que je ne pouvais installer car dépendances trop anciennes.
Résultat un " gain de version 0.0x finalement minime) mais une vélocité (un peu) moindre de l'OS.
7 De Magic Banana -
Entre Debian stable (dont les logiciels peuvent être vraiment datés) et Debian testing (trop instable peu après la sortie d'une nouvelle version stable), il y a les versions LTS d'Ubuntu... que je ne recommande pas car pleines de logiciel privateur et même d'un spyware : https://www.gnu.org/philosophy/ubun...
Mais il y a aussi Trisquel GNU/Linux ! Plus stable encore que Ubuntu LTS (puisque basée sur Ubuntu LTS mais sortant plusieurs mois après), 100% libre (recommandée par la FSF), avec GNOME Flashback ou LXDE (pour Trisquel Mini) par défaut, mais avec bien sûr la possibilité d'installer n'importe quel environnement de bureau (j'utilise aussi GNOME Shell... mais en version 3.10 dans le dépôt par défaut), avec Firefox (appelé Abrowser sur Trisquel) en dernière version par défaut (contrairement aux autres logiciels qui ne reçoivent que des mises à jour de sécurité). Utilisateur de Trisquel depuis plus de six ans, j'en suis vraiment ravi. Je vous la recommande : http://trisquel.info/fr
8 De Frederic Bezies -
@magic banana : la trisquel a passé quand même une période assez tendue, surtout quand son ancienne version stable était sortie 11 mois (ou quelque chose de ce style) après la Ubuntu 12.04 LTS. Ce qui était énorme.
http://frederic.bezies.free.fr/blog...
La Trisquel 7 (alias Belenos) est sortie plus rapidement, juste 7 mois après la sortie de la Ubuntu 14.04 LTS. Ce qui était quand même largement mieux :)
http://trisquel.info/fr/trisquel-70...
J'avais fait un test d'une préversion de la Trisquel 7.0 en août 2014 :
http://frederic.bezies.free.fr/blog...
C'est une bonne distribution 100% libre, presque utilisable, car il faut rester réaliste, le 100% libre reste du domaine du théorique. Car ta machine sera connecté au reste du monde, et tu recevras des fichiers aux formats non-ouverts.
Même si on peut se passer de flash pour nombre de sites de nos jours, via des technologies liées à HTML5.
9 De Magic Banana -
Tu peux préférer le "bleeding edge" (et Parabola GNU/Linux) mais, comme le dit le développeur principal de Trisquel, c'est le sang des utilisateurs qui coule. Mais mon argument (auquel je me tiens) est le suivant : Trisquel fournit des logiciels plus récents que Debian stable et est plus stable que Debian testing.
Mes ordinateurs personnels et professionnels n'ont de privateur que le BIOS. Il n'y a donc, pour moi, rien de théorique dans le 100% libre. Certes, ma profession aide. Je suis professeur d'université
Je reçois des fichiers MS Office que je lis avec LibreOffice. J'utilise ViewTube (un script GreaseMonkey) et Unplug pour lire des vidéos Flash. Tous les codecs multimedia communs sont installés par défaut (contrairement à la majorité des distributions GNU/Linux). Ils sont libres (ils sont couverts par des brevets logiciels mais c'est un autre problème). J'ai acheté un dongle Wifi car la carte dans mon portable ne fonctionnait pas avec Linux-libre. Mais ma liberté vaut bien les 12€ que j'ai déboursé !
10 De alterlibriste -
Merci pour ces compléments Magic Banana, c'est vrai qu'être 100% libre est difficile mais que les paquets propriétaires sont parfois une solution de facilité qui évite de trouver une meilleure alternative.